• Chapitre 2

    ***



    *CRAC*



    Ahénolïa se retourna vivement en entendant le craquement sonore résonner derrière elle. Il se tenait là. Un homme, pas franchement discret avec son manteau jaune et son grand chapeau noir. Il ressemblait aux cliqués qu'on avait sur les pêcheurs bretons. Mais il n'était sûrement pas là pour pêcher... Ahénolïa commençait à réaliser à quel point elle était en danger. Parce que l'homme au chapeau qui se tenait devant elle se mit à sourire, d'un rictus malsain.

    Il fit à nouveau un pas vers elle et l'enfant se mit à détaler à toutes jambes. Mais comment s'enfuir alors qu'elle ne savait même pas par où elle était venue ? Elle avait de trop petites jambes pour faire de si grands pas. La forêt était immense. Et l'homme se retrouva vite derrière elle. Il l'attrapa par le col de son petit manteau rouge et la tira à lui, avec force. Le choc lui coupa la respiration et Ahénolïa suffoquait, paniquée et tout à coup trop serrée dans son petit blouson. L'homme au chapeau lui plaqua une main sur la bouche, alors qu'elle commençait à appeler à l'aide. Il sortit de la poche de son manteau jaune un rouleau de Chatterton, avec lequel il scotcha les lèvres de la petite fille. Il fit trois fois le tour de sa tête avec le ruban adhésif, tout en veillant à ne pas lui boucher les narines pour qu'elle puisse respirer. Il décrocha ensuite le rouleau de la tête de l'enfant avec ses dents. Et il se pencha à son oreille pour lui susurrer tout bas :

    « Je vais te montrer comment doit se comporter une petite fille toute mignonne, toute gentille. Espèce de lâche... Tu vas voir ce que tu vas voir Nolie. »

    Comment connaissait-il son surnom ? Seuls ses parents la surnommaient ainsi. Nolie. La petite se mit alors, à sa plus grande surprise, à pleurer. Pleurer de désespoir, de peur, de rage, de fatigue, de colère, de douleur., de stupeur, de haine...

    L'homme attrapa Ahénolïa par les bras et la jeta brusquement, comme un sac, sur son épaule gauche. Il se mit alors à déambuler entre les arbres de la forêt de Mira. Ahénolïa avait l'impression qu'il ne savait pas où il allait. Mais au bout de dix bonnes minutes de marche, ils arrivèrent au bord d'un petit parking fait de terre.

    Là était garée une voiture noire. Un break noir. Ahénolïa ne reconnut pas la marque ni le modèle. Et pour cause : ce genre de voiture là était rare dans les environs. C'était le genre de véhicule qui ne passait pas totalement inaperçu dans cette petite ville, ce qui remonta le morale de la petite fille. Une chance de plus de la retrouver !

    L'homme au chapeau ouvrit la portière arrière et posa Ahénolïa sur la banquette. Il l'attacha solidement et lui ordonna de ne pas bouger. Il referma la portière, fit le tour du véhicule et s'assit sur le siège conducteur. L'enfant avait bien trop peur de ce qui pourrait lui arriver pour oser sortir de la voiture.

    A l'intérieur, ça sentait la cigarette. Ahénolïa connaissait bien cette odeur. Papa fumait. Maman fumait. Elle en était constamment entourée. L'odeur avait imprégné le cuir des sièges. Il fume beaucoup. Ahénolïa, bien décidée à s'échapper un jour, faisait tout pour garder en mémoire des indices de son ravisseur. C'est ce qu'ils demandent toujours les policiers, dans les feuilletons de maman.

    « Pouvez-vous me décrire la personne ? », « Vous souvenez-vous d'une odeur, d'un signe ou de quoique ce soit qui pourrait nous permettre de le retrouver ? »

    L'homme démarra la voiture et sortit en trombe du parking. Il n'y avait personne sur le parking. Personne pour les voir. Personne pour l'aider. Personne.



    ***



    Enfin ! Enfin il la tenait ! Elle était là, sur la banquette arrière de sa voiture ! Cette garce était à sa merci. L'homme au chapeau était le plus heureux au monde, en ce moment. Il jubilait sur son siège, surexcité à l'idée d'avoir enfin atteint son but. Il fit demi-tour et quitta le parking. Il s'engagea sur le sentier 47 et roula pendant 7 minutes. Il prit ensuite l'autoroute 32 et fonça tout droit pendant 23 minutes. Il sortit alors à droite et roula encore 5 minutes avant d'arriver dans un quartier assez chic. Il le traversa et se dirigea vers la déchetterie qui se trouvait au bout de la rue.

    Il sortit de sa voiture, regarda autour de lui afin de s'assurer qu'il n'y avait personne et contourna le véhicule avant d'ouvrir la portière arrière et de détacher Ahénolïa. Il la prit dans ses bras et s'éloigna de la voiture. Il ne repassa pas par le quartier par lequel il était arrivé.

    Il grimpa sur un talus, puis sur un deuxième et courut à travers un champ de terre, tenant toujours la petite par la main. Il arriva dans une rue aux maisons délabrées et la traversa. Il continua à courir jusqu'à arriver quelques rues plus loin, dans un quartier très chic. Il le traversa jusqu'à la moitié et se tourna vers la droite.

    Ahénolïa avait en face d'elle une maison blanche, aux volets bleu turquoise. L'allée qui menait à la maison était bordée de nombreuses fleurs, toutes différentes les unes des autres. Des lilas, des tulipes, des jonquilles, des roses, des oeillets, des jacinthes... L'allée était faite de pavés qui s'emboîtaient parfaitement. La porte de la maison était marron clair. En bois. Le toit était fait d'ardoises.

    Une si jolie maison... Mais Ahénolïa savait que derrière les apparences se cachaient certaines choses bien étranges... Elle le savait pour en être l'exemple même. Une peste derrière un visage d'ange. L'homme la posa à terre et se pencha vers elle.

    « Ahénolïa Sting. Petite peste. Sache que tu vas payer pour ton égo surdimensionné. On va bien rigoler.

    -Tu m'fais pas peur.

    -Vraiment ?

    -Oui.

    -On verra si tu raconteras la même chose dans quelques jours... »

    Il lui serra la main de toutes ses forces, à lui faire mal aux doigts. Ahénolïa avait envie de lui crier de la lâcher mais il aurait été trop heureux. Alors elle se tut, ravala ses larmes et ses grimaces de douleur et le fixa du regard. Il se releva, mit sa main derrière le dos de la petite fille et la dirigea vers l'entrée de la maison. Il ouvrit la porte et la poussa à l'intérieur d'un coup de pied.

     

     Les prochains jours s'annonçaient catastrophiques pour Nolie. 


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