• On a tous peur du noir…

    « toc toc toc...

    - Qui est là ?

    - Le monstre qui te mangera. »

     

     

     

     

     

     

     

     

    On a tous peur du noir.

     

    Si quelqu'un vous affirme que ce n'est pas son cas, demandez-lui comment il réagirait si on l'emmenait dans une maison inconnue, dont il sait qu'elle pourrait renfermer les pires cauchemars de sa vie.

     

    Si on l'allongeait sur une table en métal, attaché par des sangles de cuir, entouré d'enfants qui ne soucient même plus de s'enfuir.

     

     

    Vous voyez des frissons le parcourir ?

     

    La chair de poule couvrir ses avant-bras ?

     

    Vous voyez cela ?

     

     

    Alors vous pouvez le lui affirmer à nouveau. On a tous peur du noir...

  • Dans la petite ville de Westminston, il y avait un quartier chic, où vivaient toutes les familles les plus fortunées de la région. Et puis il y avait la famille Sting. Héritiers d'un vieux peintre qui avait fait fureur dans les années 50, ils avaient hérité de la splendide demeure qu'il avait, jadis, achetée dans le quartier.

    Jimmy Sting était agent immobilier, mais pas du genre de ceux que l'on peut voir à la télévision, bien habillés, cheveux laqués et chaussures bien cirées. C'était un homme de 37 ans qui en paraissait dix de plus, les cheveux toujours plaqués en arrière et tellement gras qu'ils donnaient l'impression d'avoir été lustrés à la moelle de bœuf. Il était toujours vêtu du même costume : un veston gris – noir au départ, puis gris à force de le porter – qui lui descendait jusqu'aux genoux, une chemise blanche – qui ne l'était plus vraiment, tachée par le chocolat que Jimmy dévorait à chaque fin de journée – et un pantalon dix fois trop grand pour ce petit homme bedonnant. Le tout agrémenté d'une paire de chaussures trop petites et pleines de boue.

    Jimmy était marié à une femme nommée Alésia, comme la bataille.

    Elle était blonde, trop maquillée, avec des formes très marquées, à la limite entre la chirurgie esthétique ratée et la disproportion. Elle était petite, tout son corps était large et imposant, sauf sa tête qui donnait l'impression d'avoir été posée là par hasard. Une tête ronde, petite, fine et pâle. Son seul avantage était ses yeux bleus. Cela pourrait paraître cliché mais l'on y plongeait à chaque coup d'oeil. Elle ne le savait pas, mais sous la couche de maquillage qui enlaidissait son visage, se cachait un visage rond et harmonieux, un nez fins, des sourcils qui n'avaient nul besoin d'être maquillés, des cils d'un blond très clair qui aurait pu sembler jolis s'ils n'étaient pas couverts de mascara et des lèvres pleines mais loin d'être vulgaires, si n'y avait pas toutes ces couches de rouge à lèvres dessus...

    Elle était mère au foyer. Alésia s'occupait de sa fille, Ahénolïa Sting.

    C'était une enfant de 6 ans, qui ne ressemblait ni tout à fait à son père, ni totalement à sa mère. Elle avait des cheveux couleur caramel et des yeux vert émeraude. Ses cheveux lui tombaient jusque dans le bas du dos, en une longue cascade de boucles soyeuses. Elle avait constamment un sourire aux lèvres et un regard pétillant de malice. Elle avait de bonnes joues souvent pleines de bonbons et son père lui couvrait toujours le chef d'une casquette de Baseball rouge, qu'elle mettait à l'envers, visière en arrière. Ahénolïa était la plus adorable des enfants du quartier. Tous les habitants la trouvaient « mignonne », « à croquer », « partageuse » et « généreuse ».

     

    Du moins c'est ce qu'ils croyaient...


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  • Tout était sombre dans la forêt de Mira. Autour de la petite Ahénolïa, les feuilles des arbres projetaient leurs ombres sur les feuilles mortes qui jonchaient le sol, tandis que les branches semblaient se battre entre elles avec férocité. Le vent glacial fouettait les joues roses de l'enfant. Elle était transie de froid, grelottant dans son petit manteau rouge. Ses dents s'entrechoquaient violemment, mordant, au passage, ses lèvres gercées.

    La petite fille était en train de geler sur place, au milieu de nul part, mais se refusait toujours à rentrer chez elle. Si Ahénolïa Sting retournait chez elle, elle se considérerait elle-même comme une lâche. Elle avait défié ses parents et s'ils la voyaient passer le pas de la porte, ils se moqueraient d'elle. Elle en était sûre. Et lorsqu'elle se mettait à douter, leurs paroles lui revenaient en mémoire et la faisaient dire tout haut qu'elle ne bougerait pas.

    « Papa est-ce que je suis une lâche ?

    -Les gens qui affrontent la tempête, bravent le froid pour aller travailler, les médecins, les pompiers, les gendarmes ne sont pas lâches par exemple. Alors en ce moment tu peux te considérer comme lâche parce que tu es là, emmitouflée dans ton peignoir, au chaud devant ta télé. Oui Nolie, on peut dire que tu es lâche. »

    Non, les parents de la petite Ahénolïa n'étaient pas tendres avec elle. C'est peut-être d'ailleurs pour cela qu'elle était devenue, au fil des jours, une gamine capricieuse, prétentieuse et égoïste, comme ses parents. Ahénolïa était aussi peste que sa mère et hautaine que son père. Mais elle n'était pas née ainsi. Non, elle pensait que c'était ses parents qui l'avaient changée. Elle rejetait systématiquement la faute sur son père et sur sa mère, refusant de croire qu'elle avait toujours été comme ça.

    Mais Ahénolïa regrettait d'être aussi fière parce que c'était cela qui l'avait conduite dans les bois. Et la voilà maintenant trempée jusqu'aux os, gelant sur place, morte de peur parce qu'elle avait erré entre les troncs, sans vraiment regarder le chemin qu'elle prenait. Si on pouvait appeler cela un chemin. Elle avait plutôt l'impression d'être hors du sentier. Et ce depuis très longtemps.

    Quelle sotte ! Elle se maudissait intérieurement d'avoir autant de fierté ! Si seulement elle avait le cran de rentrer chez elle... Mais non. Parce qu'Ahénolïa était une gamine stupide, idiote et dotée d'un égo surdimensionné !

    ***

    Ah ! La voilà ! La p'tite gamine aux yeux verts ! La prétentieuse ! La détestable ! La petite Ahénolïa !

    Caché derrière un arbre, un homme emmitouflé dans un long manteau jaune, coiffé un chapeau noir, observait la petite fille qui gelait au milieu des bois. Depuis le temps qu'il attendait ce moment... L'homme au chapeau avait passé les 27 derniers jours à venir dans les alentours pour surveiller le comportement et les habitudes de l'enfant. Et le moment était venu. Il allait enfin pouvoir atteindre son but, qu'il convoitait tant depuis de nombreux mois...

    L'homme au chapeau n'était plus qu'à quelques pas de l'enfant, quelques pas... Il avança son pied gauche. Un pas. Il avança son pied droit. Deux pas. Il était arrivé à 8 mètres derrière Ahénolïa. Elle ne l'entendait même pas marcher sur les feuilles mortes à cause des rafales assourdissantes qui secouaient la forêt. Pied gauche. Pied droit. Pied gauche. Pied droit. Pied g...

    *CRAC*

    L'homme au chapeau venait de marcher sur une branche desséchée que le vent avait fait tomber. Il vit la petite se retourner vivement dans sa direction et ouvrir des yeux grands comme des soucoupes quand elle s'aperçut qu'elle n'était pas toute seule dans les bois. Et que cet homme n'était sûrement pas là par hasard...

     

     Il devait agir... Vite.  


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  • ***



    *CRAC*



    Ahénolïa se retourna vivement en entendant le craquement sonore résonner derrière elle. Il se tenait là. Un homme, pas franchement discret avec son manteau jaune et son grand chapeau noir. Il ressemblait aux cliqués qu'on avait sur les pêcheurs bretons. Mais il n'était sûrement pas là pour pêcher... Ahénolïa commençait à réaliser à quel point elle était en danger. Parce que l'homme au chapeau qui se tenait devant elle se mit à sourire, d'un rictus malsain.

    Il fit à nouveau un pas vers elle et l'enfant se mit à détaler à toutes jambes. Mais comment s'enfuir alors qu'elle ne savait même pas par où elle était venue ? Elle avait de trop petites jambes pour faire de si grands pas. La forêt était immense. Et l'homme se retrouva vite derrière elle. Il l'attrapa par le col de son petit manteau rouge et la tira à lui, avec force. Le choc lui coupa la respiration et Ahénolïa suffoquait, paniquée et tout à coup trop serrée dans son petit blouson. L'homme au chapeau lui plaqua une main sur la bouche, alors qu'elle commençait à appeler à l'aide. Il sortit de la poche de son manteau jaune un rouleau de Chatterton, avec lequel il scotcha les lèvres de la petite fille. Il fit trois fois le tour de sa tête avec le ruban adhésif, tout en veillant à ne pas lui boucher les narines pour qu'elle puisse respirer. Il décrocha ensuite le rouleau de la tête de l'enfant avec ses dents. Et il se pencha à son oreille pour lui susurrer tout bas :

    « Je vais te montrer comment doit se comporter une petite fille toute mignonne, toute gentille. Espèce de lâche... Tu vas voir ce que tu vas voir Nolie. »

    Comment connaissait-il son surnom ? Seuls ses parents la surnommaient ainsi. Nolie. La petite se mit alors, à sa plus grande surprise, à pleurer. Pleurer de désespoir, de peur, de rage, de fatigue, de colère, de douleur., de stupeur, de haine...

    L'homme attrapa Ahénolïa par les bras et la jeta brusquement, comme un sac, sur son épaule gauche. Il se mit alors à déambuler entre les arbres de la forêt de Mira. Ahénolïa avait l'impression qu'il ne savait pas où il allait. Mais au bout de dix bonnes minutes de marche, ils arrivèrent au bord d'un petit parking fait de terre.

    Là était garée une voiture noire. Un break noir. Ahénolïa ne reconnut pas la marque ni le modèle. Et pour cause : ce genre de voiture là était rare dans les environs. C'était le genre de véhicule qui ne passait pas totalement inaperçu dans cette petite ville, ce qui remonta le morale de la petite fille. Une chance de plus de la retrouver !

    L'homme au chapeau ouvrit la portière arrière et posa Ahénolïa sur la banquette. Il l'attacha solidement et lui ordonna de ne pas bouger. Il referma la portière, fit le tour du véhicule et s'assit sur le siège conducteur. L'enfant avait bien trop peur de ce qui pourrait lui arriver pour oser sortir de la voiture.

    A l'intérieur, ça sentait la cigarette. Ahénolïa connaissait bien cette odeur. Papa fumait. Maman fumait. Elle en était constamment entourée. L'odeur avait imprégné le cuir des sièges. Il fume beaucoup. Ahénolïa, bien décidée à s'échapper un jour, faisait tout pour garder en mémoire des indices de son ravisseur. C'est ce qu'ils demandent toujours les policiers, dans les feuilletons de maman.

    « Pouvez-vous me décrire la personne ? », « Vous souvenez-vous d'une odeur, d'un signe ou de quoique ce soit qui pourrait nous permettre de le retrouver ? »

    L'homme démarra la voiture et sortit en trombe du parking. Il n'y avait personne sur le parking. Personne pour les voir. Personne pour l'aider. Personne.



    ***



    Enfin ! Enfin il la tenait ! Elle était là, sur la banquette arrière de sa voiture ! Cette garce était à sa merci. L'homme au chapeau était le plus heureux au monde, en ce moment. Il jubilait sur son siège, surexcité à l'idée d'avoir enfin atteint son but. Il fit demi-tour et quitta le parking. Il s'engagea sur le sentier 47 et roula pendant 7 minutes. Il prit ensuite l'autoroute 32 et fonça tout droit pendant 23 minutes. Il sortit alors à droite et roula encore 5 minutes avant d'arriver dans un quartier assez chic. Il le traversa et se dirigea vers la déchetterie qui se trouvait au bout de la rue.

    Il sortit de sa voiture, regarda autour de lui afin de s'assurer qu'il n'y avait personne et contourna le véhicule avant d'ouvrir la portière arrière et de détacher Ahénolïa. Il la prit dans ses bras et s'éloigna de la voiture. Il ne repassa pas par le quartier par lequel il était arrivé.

    Il grimpa sur un talus, puis sur un deuxième et courut à travers un champ de terre, tenant toujours la petite par la main. Il arriva dans une rue aux maisons délabrées et la traversa. Il continua à courir jusqu'à arriver quelques rues plus loin, dans un quartier très chic. Il le traversa jusqu'à la moitié et se tourna vers la droite.

    Ahénolïa avait en face d'elle une maison blanche, aux volets bleu turquoise. L'allée qui menait à la maison était bordée de nombreuses fleurs, toutes différentes les unes des autres. Des lilas, des tulipes, des jonquilles, des roses, des oeillets, des jacinthes... L'allée était faite de pavés qui s'emboîtaient parfaitement. La porte de la maison était marron clair. En bois. Le toit était fait d'ardoises.

    Une si jolie maison... Mais Ahénolïa savait que derrière les apparences se cachaient certaines choses bien étranges... Elle le savait pour en être l'exemple même. Une peste derrière un visage d'ange. L'homme la posa à terre et se pencha vers elle.

    « Ahénolïa Sting. Petite peste. Sache que tu vas payer pour ton égo surdimensionné. On va bien rigoler.

    -Tu m'fais pas peur.

    -Vraiment ?

    -Oui.

    -On verra si tu raconteras la même chose dans quelques jours... »

    Il lui serra la main de toutes ses forces, à lui faire mal aux doigts. Ahénolïa avait envie de lui crier de la lâcher mais il aurait été trop heureux. Alors elle se tut, ravala ses larmes et ses grimaces de douleur et le fixa du regard. Il se releva, mit sa main derrière le dos de la petite fille et la dirigea vers l'entrée de la maison. Il ouvrit la porte et la poussa à l'intérieur d'un coup de pied.

     

     Les prochains jours s'annonçaient catastrophiques pour Nolie. 


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  • Samedi 23 janvier 2009, 12h17, maison de la famille Sting.



    Jimmy Sting était affalé sur le canapé du salon, regardant un match de baseball féminin. Il avait toujours aimé la façon dont les filles bougeaient leurs hanches à chaque coup de batte qu'elles donnaient. Il se disait toujours que ce ne serait jamais Alésia qui régalerait ses yeux à ce point. Il avait ouvert sa chemise, laissant voir son torse hideux et couvert de poils. Il avait jeté ses chaussures dans l'entrée, ne prenant pas la peine de vérifier qu'elles ne gêneraient personne, les laissant traîner ainsi, au milieu du passage.

    Alésia était debout dans sa cuisine, s'escrimant à ouvrir une boîte de conserve contenant leur repas du soir. Elle n'était pas une grande cuisinière, encore moins un chef. Son seul talent culinaire se limitait au fait d'ouvrir les boîtes avec un ouvre-boîte pour gaucher, alors qu'elle était droitière. Mais ce jour-là, la boîte lui résistait et elle dût se résoudre à demander de l'aide à son mari.

    « Jim !

    - Quoi encore ?!

    - Tu peux m'aider ?

    - A faire quoi ?

    - Ouvrir la boîte.

    - Godiche...

    - Pardon ?

    - Donne-moi ça ! »

    Il lui arracha presque la boîte des mains et se mit à l'ouvrir brusquement.

    « Eh bien voilà, c'est pas compliqué !

    - Merci...

    - Où elle est l'autre ?

    - Qui ça ?

    - Ta fille tiens !

    - Arrête de l'appeler '' l'autre ''...

    - Elle est jamais là quand il faut.

    - Je ne sais pas où elle est.

    - Ahénolïa Sting vient ici ! se mit-il à hurler dans la maison.

    (...)

    - Mais où est-ce qu'elle est encore planquée ?

    - Laisse-la Jim...

    - Non ! Quand je l'appelle elle vient ! Nolie !

    - Jim laisse... »

    Jim lui assena une violente gifle qui laissa une marque rouge sur la joue d'Alésia.

    « Jim !

    -Tais-toi ! Nolie ? Viens ici ma chérie...

    - Ne viens pas Nolie ! Reste où tu es !

    - Tais-toi bon sang ! Je veux voir ma fille !

    - Tu oses te prendre pour son père ? Tu as vu comment tu lui parles ? Tu ne t'occupes jamais d'elle ! Tu passes ton temps à la traiter de lâche ! Tu la laisses faire n'importe quoi !

    - Moi ? Moi je la laisse faire n'importe quoi ? Dois-je te rappeler à cause de qui nous avons dû l'envoyer à l'hôpital parce qu'elle avait failli avaler du détergent ?

    - C'était un accident ! Je l'avais quittée des yeux pendant dix secondes ! Dix secondes !

    - Dix secondes de trop !

    - Et toi ? Tu étais où pour la surveiller ? Hein ? Dis-le moi !

    - Je ne peux pas toujours être là !

    - Et moi si ? C'est ça ?

    - Tu es sa mère ! D'ailleurs va voir où elle est !

    - Tu n'as qu'à y aller toi-même ! C'est bien toi qui la cherche non ?

    - Bon sang c'que tu m'énerves ! »

    Jimmy se leva avec peine de son canapé et se dirigea vers l'escalier qui menait à l'étage. Il monta chacune des marches en bois de l'escalier en tapant des pieds, afin de bien faire comprendre à sa femme que si ce tapage l'agaçait, elle n'avait qu'à monter chercher leur fille elle-même.

    Il déboula sur le palier, énervé au plus haut point et ouvrit violemment la porte de la chambre de la petite Ahénolïa, provoquant un courant d'air qui fit voler les nombreuses feuilles de dessin qui était posées en tas sur le petit bureau qu'elle avait reçu pour ses 3 ans.

    Elle n'était pas là. Il fouilla partout : sous le lit, dans l'armoire, sous le bureau, derrière la porte, sous la couverture et même sous le matelas. Aucune trace de sa fille. Sa colère redoubla d'intensité.

    « Ahénolïa Sting arrête de jouer ! C'est pas drôle ! Si tu ne sors pas tout de suite de ta cachette et que c'est moi qui te trouve tu vas avoir de sérieux problèmes ! Dépêche-toi »

    Il entra dans sa propre chambre et fouilla aux mêmes endroits que dans la pièce précédente. Toujours personne. Il continua à regarder dans toutes les recoins de l'étage mais faisait toujours chou blanc. Il redescendit en bas, furieux et mit chacune des pièces sens dessus dessous. Enervée par tout ce bruit, Alésia sortit de sa cuisine afin d'aller voir ce que faisait son mari.

    « Elle n'est pas en haut ? demanda-t-elle d'une petite voix.

    - Tu crois vraiment que si elle était en haut je serais ici en train de m'embêter à tout fouiller ? Réponds !

    - Non...

    - Alors arrête de poser des questions idiotes à longueur de journée et retourne dans ta cuisine ! »

    Ayant peur de se prendre une nouvelle gifle, Alésia obéit à l'ordre de son mari et retourna préparer son ''repas''.

    Jimmy se tenait debout dans le garage et avait maintenant retourné chacune des pièces de la maison, mais aucune trace de sa fille. C'est alors qu'il vit, sur le panier à linge sale, près de la machine à laver, un petit peignoir rose pale. Et il se souvint.

    Il retourna à l'intérieur de la maison pour s'affaler de nouveau dans son canapé et continua à regarder les jeunes joueuses de baseball. Alésia, intriguée par l'arrêt soudain de ses recherches, s'avança timidement vers lui.

    « Alors tu... tu l'as trouvée ?

    - Non.

    - Et tu ne la cherches plus ?

    - Pas la peine. Je sais où elle est. Je m'en souviens, maintenant.

    - Ah oui ? Et où est-elle ?

    - Dans les bois.

    - Dans les bois ?

    - Eh bien oui puisque j'te l'dis !

    - Mais qu'est-ce qu'elle fait là-bas ?

    - Mais comment veux-tu que j'le sache ?

    - Mais pourquoi est-elle partie là-bas ?

    - Je l'ai traitée de lâche.

    - Pourquoi ?

    - Je t'en pose des questions moi ! Elle m'a demandé si elle était lâche, je lui ai donné des exemples de personnes courageuses et je lui ai dit que comparée à ces gens là, elle était lâche à rester toute la journée au chaud dans son peignoir !

    - Il faut qu'on aille la chercher !

    - Elle va revenir.

    - Et si elle s'est perdue ?

    - Bah... qu'est-ce que tu veux que j'te dise ?

    - Viens Jim ! On y va !

    - Mais... et le match...

    - On s'en fiche ! Il y en aura d'autres des jeunes filles qui se tortillent pour taper dans une balle ! »

    Jimmy se leva à contrecoeur et suivit sa femme dehors, après qu'ils eurent mis leurs chaussures. Ils allèrent vers la forêt de Mira, qui était attenante à leur maison et s'y engouffrèrent. Ils commencèrent à appeler Ahénolïa.

     

     Ils n'eurent aucune réponse... 


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  • Samedi 23 janvier 2009, 13h05, commissariat de police de Westminston, bureau du l'agent Bory.



    L'agent Ïga Bory se tenait debout devant sa fenêtre, regardant les hautes tours qui surplombaient la ville. Elle aurait aimé avoir un paysage de vallées ensoleillées, de cascades et de champs de tournesols. Mais elle avait eu le droit à des tours d'acier. Oh, bien sûr, elle était consciente qu'elle n'aurait que ce paysage sinistre en vue, quand elle avait accepté de venir travailler dans le commissariat de Westminston. Mais elle regrettait amèrement les fabuleux décors de sa Hollande natale.

    Ïga Bory était une grande femme, mince, les cheveux coupés au carré, châtains, portant toujours des chemises blanches sous un veston bleu ou une veste en cuir marron. Elle se déplaçait toujours avec élégance et délicatesse. On aurait dit un chat. Ou une panthère. Ses collègues spéculaient encore sur le félin qui la représentait au mieux. Elle avait de longues jambes très fines et musclées. Ses poignets aussi étaient fins et semblaient pouvoir être brisés si elle les bougeait trop brusquement.

    Car brusque elle l'était. Elle avait une force incroyable et s'amusait beaucoup à courir après les suspects, meurtriers, voleurs et autres malfrats. Elle se jetait sur eux avec joie et leur plaquait les bras dans le dos avec force. Elle était légèrement sadique d'après ses collègues, mais elle aimait ça.

    C'est alors que quelqu'un frappa à la porte du bureau d'Ïga, l'arrachant à ses pensées. Elle sursauta puis se retourna vivement, surprise que l'on vienne la voir à l'heure du déjeuner. Habituellement, tous les agents se retrouvaient au restaurant qui se trouvait en face du commissariat. Elle pensait être toute seule dans le bâtiment. Parfois même, quelqu'un fermait la grande porte à clé et elle se retrouvait coincée à l'intérieur.

    Elle cria à la personne d'entrer, pressée d'être seule à nouveau. C'était Annie, la secrétaire du commissariat. Elle était penchée derrière la porte, laissant voir uniquement son visage rond, ses lunettes rouges et sa tignasse rousse. Elle tenait un téléphone serré contre sa poitrine, afin de masquer les bruits de la conversation à l'interlocuteur, et regardait Ïga d'un air gêné, sachant qu'elle la dérangeait un petit peu.

    « Hum... Agent Bory, c'est une certaine Alésia Sting. Elle appelle parce que sa fille est partie dans la forêt de Mira ce matin et qu'elle n'est pas revenue. La dame et son mari l'ont appelée pendant une heure, en parcourant les bois, sans réponse. Elle demande si vous pouvez venir avec une équipe pour ratisser la forêt et les rues alentours.

    - Passez-la-moi Annie, s'il vous plait.

    - Oui, bien sûr. »

    Ïga s'empara du téléphone et se mit à faire les cent pas pendant qu'elle discutait avec Mme Sting. En se tournant, elle vit Annie s'éclipser en refermant discrètement la porte derrière elle.

    « Mme Sting ? Alésia Sting ?

    (Alésia ! quel drôle de prénom... remarque, Ïga ce n'est pas vraiment mieux...)

    - Oui. Oui c'est moi, répondit Alésia d'une voix étrange et étouffée.

    (elle pleure ou elle rigole ?)

    - Mme Sting votre fille est perdue dans les bois c'est bien cela ?

    (OK, elle pleure. parents indignes ! laisser une gosse toute seule dans la forêt de Mira...!)

    - Oui. Elle est partie dans les bois ce matin et elle n'est pas rentrée. On est parti la chercher, mon mari et moi, on l'a appelée mais rien. Aucune réponse.

    - Quel âge à votre fille ?

    - 6 ans madame.

    - Comment s'appelle-t-elle ?

    - Ahénolïa. Ahénolïa Sting.

    (oui merci, je me doute que son nom de famille est Sting... Ahénolïa... c'est vraiment une manie apparemment dans cette famille...)

    - Mme Sting, vers quelle heure est-elle sortie dehors ?

    - Je ne sais pas... *Chéri vers quelle heure est-elle sortie ? **J'en sais rien moi ! Vers 9h !* Vers 9h madame.

    - D'accord, merci madame Sting. J'aurai besoin du numéro et du nom de votre rue, s'il vous plait.

    (j'espère qu'elle ne va pas me répondre « Centre de désintoxication de Westminston, chambre 27 »...)

    - 12 rue des Colombes.

    (merci, mon Dieu...)

    - D'accord, merci madame, je vous envois une équipe. Elle devrait arriver dans... une quinzaine de minutes je pense. Vous devriez attendre chez vous, le temps que nos agents arrivent.

    -Oui. D'accord. Merci. »

    Ïga raccrocha et sortit de son bureau pour se rendre dans celui d'Annie, afin de lui rendre son téléphone. Lorsqu'elle y entra, il n'y avait personne.

    (sûrement au resto...)

    Elle reposa donc le téléphone et ressortit pour retourner à son bureau. Elle s'assit et mangea les deux sandwichs qu'elle avait achetés pour midi, histoire d'éviter de devoir aller au restaurant avec les autres.

     

     Ïga Bory n'était décidément pas une femme que l'on pouvait qualifier de « très sociable ».


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