• Dimanche 24 janvier 2009, 12h46, commissariat de police de Westminston, escalier du premier étage.



    Hirvy et Bory étaient tous deux assis sur la troisième marche de l'escalier du premier étage. Ïan avait décliné l'invitation de ses collègues apour venir manger au fast-food d'en face et avait demandé à Ïga de venir s'asseoir avec lui, sur les marches de cet escalier.

    Ils regardaient à présent le bout de leurs chaussures, ne sachant que faire. Ïga n'avait aucune idée de ce que Ïan avait l'intention de lui dire et ce dernier ne savait pas vraiment par où commencer.

    « Donc, hum, Ïga je voulais te parler un petit peu...

    - Oui, de quoi ?

    - De... enfin... de l'affaire Sting.

    - Ah. Et qu'est-ce que tu voulais savoir ? demanda-t-elle, ne se doutant de rien mais se braquant tout de même, par habitude.

    - Tu la connais ? Ahénolïa Sting ? Réponds moi franchement, s'il te plaît.

    - Non, je ne la connais pas.

    - Alors pourquoi est-ce que tu sembles tellement... comme... attachée à elle ?

    - C'est... compliqué.

    - Ïga nous avons plus d'une heure alors j'ai le temps pour les histoires compliquées.

    - Je... Je n'en parle à personne, à part à Jarvy.

    - Ah. Donc il sait.

    - Oui. Mais ce n'est pas contre toi ! s'empressa-t-elle de répondre, voyant qu'il était déçu de ne pas avoir été mis dans la confidence. C'est juste que je n'aime pas en parler...

    - OK. Alors je suppose que ce n'est pas aujourd'hui que je le saurai. »

    Hirvy commença à se lever pour partir rejoindre ses collègues quand Ïga lui attrapa le bras pour le faire rasseoir.

    « ATTENDS ! Attends. Je vais te le dire.

    - Je ne t'y oblige pas Ïga. Si c'est vraiment trop personnel tu n'es pas obligée de...

    - Si. Il faut que je le dise à quelqu'un. Je veux dire... à quelqu'un d'autre que Jarvy.

    - D'accord. Alors je t'écoute.

    - C'était le 24 mai 1986. J'étais venue avec mes parents ici, à Westminston. J'avais 7 ans et j'habitais toujours en Hollande mais mes grands-parents, eux, vivaient ici. Alors nous venions les voir de temps en temps.

    « Nous avions pris l'apéritif et le repas dehors. Il était midi et il faisait très beau. Très chaud aussi. Je m'ennuyais un peu à table. Tu comprends, il n'y avait pas d'enfants hormis moi. Alors mon père m'a proposé d'aller me promener dans la forêt de Mira. Ce n'était pas la première fois que j'y allais. Mon père et moi nous y promenions souvent quand nous venions à Westminston. C'est une belle forêt. Alors j'ai pris mon manteau, j'ai mis mes bottes, j'ai attrapé un petit panier en osier et je suis partie dans la forêt. Quand mes parents se sont levés de table pour rentrer à l'intérieur il était 18h30 et ils ne me voyaient toujours pas revenir.

    « Quand j'étais dans les bois, je cueillais des champignons. Chaque fois que je me baissais pour en ramasser, j'en voyais d'autres plus loin. Et c'est comme ça que me suis éloignée du chemin. Au bout d'un moment j'ai relevé la tête. Mon panier était plein et j'avais décidé de rentrer. Mais je ne reconnaissais rien. Plus rien. Je ne savais plus où j'étais. Je m'étais tellement éloignée du chemin, tête baissée, que je ne savais même plus par où j'étais venue. J'avais tourné dans tous les sens, sans regarder la route.

    « Je commençais tout juste à paniquer quand j'ai entendu un gros bruit. Une branche venait de craquer derrière moi. Je me suis retournée d'un coup, comme une fusée, et je l'ai vu. Un grand homme. Avec un manteau rouge et une casquette bleu marine qui m'empêchait de voir son visage. Je suis partie en courant. J'ai détalé le plus vite possible mais il avait des grandes jambes et il m'a vite rattrapée. Il a tiré sur le col de mon manteau et j'ai commencé à me débattre, en essayant de lui décocher des coups de pieds... « bien placés ». Mais il était trop fort et trop grand, et je commençais à étouffer. Alors il a sorti un rouleau de Chatterton de sa poche et il a fait trois fois le tour de ma tête avec, en laissant mon nez dégagé pour que je respire quand même.

    « Il m'a pris dans ses bras et il m'a emmenée jusqu'au petit parking en terre. Tu sais celui où on doit commencer la recherche d'indices cet après-midi. Eh bien il avait garé sa Range Rover bleue marine là et il m'a forcée à monter dedans. On a roulé pendant pas mal de temps et il s'est ensuite arrêté devant une jolie maison aux murs rose pâle.

    « Les volets étaient bleus foncé et son allée étaient bordée de mauvaises herbes. La maison tombait presque en ruine mais elle tenait encore debout. Je me demandais bien comment d'ailleurs. Il m'a à nouveau portée dans ses bras et nous sommes entrés dans son taudis.

    - Tu y es restée combien de temps Ïga... ?

    - Trois mois... »

    Ils restèrent assis côte à côte, en silence. Ces souvenirs revenaient à Ïga avec force et Hirvy était tellement choqué et abasourdi qu'il ne savait plus que dire.

    « Quand ils m'ont trouvée j'étais allongée dans la cave de cet homme, sur une table métallique. Il m'avait attaché les bras et les jambes avec des ceintures de cuir, comme dans les hôpitaux psychiatriques. Je portais la même tenue depuis qu'il m'avait attrapée dans les bois. Pendant trois mois je n'avais pas pu bouger. Il me donnait des petits pots pour bébé avec une cuillère pour me nourrir et me faisait faire mes besoins dans une bouteille en plastique. Je ne pouvais rien faire. Et plus je restais allongée ainsi, ne pouvant bouger, plus je devenais faible et incapable de résister.

    « Ils m'ont trouvée comme ça. Je devais être bien pitoyable à voir...

    - Ne dis pas ça Ïga, je t'en supplie.

    - Tu m'aurais vu... Ensuite j'ai passé deux mois à l'hôpital de Westminston et je suis rentrée en Hollande avec mes parents. Ils ont juré de ne plus jamais revenir à Westminston. Ça a fait un choc à mes grands-parents. Je ne les ai presque pas revu depuis. Les rares fois, c'était eux qui étaient venus chez nous. Mes parents ont toujours refusé catégoriquement leurs invitations. En même temps, je les comprends...

    - Oui, ils avaient une sacré bonne raison...

    - Ouais... »

    Ïga avait le regard perdu dans le vide. Elle pensait à Ahénolïa et à ce qu'elle était peut-être en train de subir, en ce moment même. L'agent Bory n'aimait pas les disparitions. Les disparitions d'enfants. Les disparitions dans Mira...

    Des bruits de pas la firent sursauter, elle et Ïan. Tandis qu'elle relevait la tête, Berhzo et Spitz entraient dans le commissariat en brandissant des sachets de fast-food.

    « Vous n'étiez pas au restaurant ? demanda Ïga

     

     - Tu croyais vraiment qu'on allait manger sans vous ? » 


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  • Dimanche 24 janvier 2009, 13h58, parking de la forêt de Mira.

     

    Ïga sortit de sa voiture avec Hirvy tandis que Spitz et Berhzo arrivaient dans leur Range Rover. Dans la petite ville de Westminston, c'était la voiture que l'on voyait le plus souvent.

    Ïga sortit une carte de sa boîte à gants et la déplia, avant de la poser sur le capot de sa voiture. Elle représentait un plan détaillé de la forêt de Mira.

    « Bon. Irvy et Kurt, vous irez devant la maison des Sting et vous commencerez à suivre le chemin qui amène jusqu'à ce parking-ci. Ïan et moi on va faire la même chose en sens inverse.

    - Mais pourquoi est-ce qu'on doit aller jusqu'au parking ? demanda Spitz. On va forcément se croiser sur le chemin.

    - Parce qu'il ne faut louper aucun indice. Aucun, lui répondit Ïga.

    - D'accord.

    - Donc on va faire ça. Emportez plusieurs sacs avec vous, pour y mettre les indices si vous en trouvez. Ça m'étonnerais mais tant pis.

    - OK.

    - Vous avez des questions ?

    - Non, tout est OK pour moi ! dit Hirvy.

    - Idem ! renchérirent Kurt et Irvy.

    - OK. Alors c'est parti ! »

    Ïga replia sa carte prestement, Hirvy sortit une petite caisse noire du coffre de la voiture d'Ïga et tendit à Spitz et Berhzo de nombreux sacs transparents. Ces deux derniers remontèrent dans leur Range Rover et quittèrent le parking en terre afin d'aller à la maison des Sting. Ïan était adossé à la voiture pendant que Bory remettait le plan de Mira dans la boîte à gants.

    « On va d'abord prendre des photos du parking, pour vérifier les traces de pneus. Si elle a été enlevée, son ravisseur est probablement venu en voiture.

    - Pas forcément... Peut-être qu'il habite juste à côté...

    - C'est un enfer à pied. Il faut monter toute la côte à l'aller. Tu imagines redescendre une pente raide, avec une enfant de 6 ans dans les bras. C'est de la folie !

    - Oui, c'est vrai.

    - Donc il faudra prendre des photos de chaque trace de pneus sur ce parking. Sauf celles de notre voiture et de celle de Kurt.

    - D'accord. Quoi d'autre ?

    - On ramasse chaque indice qu'on trouve. Et si on n'est pas sûrs que ce soit vraiment utile, on demande à l'autre, ou on met quand même dans un sac. On ne sait jamais...

    - OK. »

    Ils se mirent donc à prendre de nombreuses photos de chacune des traces de pneus présentes sur le parking. Ce qui désespéra d'ailleurs Ïga, vu le nombre de traces qu'elle photographiait. Mais elle ne perdait pas totalement espoir, se disant qu'ils trouveraient forcément le coupable parmi les propriétaires de l'une de ces voitures. Après tout, les traces qui semblaient être les plus récentes étaient très différentes des autres traces qu'Ïga et Ïan pouvaient trouver autour d'eux.

    Après avoir pris de multiples photos et recueillis très peu d'indices potentiels, Ïga et Ïan se dirigèrent vers la forêt.

    « Tu sais Ïga, si tu préfères que j'y aille tout seul, tu me le dis, il n'y aucun problème...

    - Non, c'est bon. Ça va aller.

    - D'accord. »

    Ils pénétrèrent donc ensemble dans la forêt de Mira, presque collés l'un à l'autre, regardant le sol à la recherche d'indices. Au bout d'une quinzaine de minutes, ils croisèrent enfin Berhzo et Spitz.

    « Alors, vous avez trouvé quelque chose ? leur demanda Ïga.

    - Pas grand chose. On pense qu'elle était sûrement éloignée du chemin quand ça s'est passé, répondit Spitz

    - Oui c'est ce qu'on pensait aussi...

    - Bon... bah on va continuer alors !

    - Oui. Tu peux me passer les clés de ta voitures Kurt ? demanda Ïga

    - Pourquoi ?

    - Pour revenir au parking quand on sera arrivés devant la maison des Sting.

    - Oh, oui bien sûr ! Tiens, les voilà.

    - Merci. »

    Berhzo tendit ses clés de voiture à Ïga et celle-ci lui tendit les siennes.

    « Bon, on finit notre tour et on se retrouve au commissariat, dans mon bureau, avec toutes les photos et les indices.

    - Pas de problèmes ! »

     

     Berhzo et Spitz reprirent le chemin qui conduisait au parking tandis que Bory et Hirvy repartaient vers la maison des Sting. 


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  • Dimanche 24 janvier 2009, 17h08, bureau de Simönn Jarvy, commissariat de police de Westminston.



    Ïga toqua doucement à la porte, comme si elle avait eu peur de réveiller quelqu'un. Simönn leva la tête, surpris, avant de se lever de sa chaise et de venir vers sa collègue.

    « Ah, Ïga ! Tu es venue parler de...

    - Oui et non.

    - C'est à dire ?

    - J'en ai parlé à Ïan. Je lui ai tout raconté. Parce que tu sais, c'est mon meilleur ami et...

    - Comment te sens-tu ?

    - Je ne sais pas. Vidée. Fatiguée. Essoufflée.

    - Tu es heureuse ? Soulagée ?

    - Pas autant que ce à quoi je m'attendais...

    - C'est normal. Tu es trop exigeante Ïga...

    - Je sais. Mais je m'en voulais de ne rien lui dire alors... voilà.

    (...)

    - Je voulais aussi te poser des questions sur l'affaire en cours, poursuivit Ïga.

    - Vas-y, je t'écoute.

    - Est-ce que tu as eu le temps d'établir le profil psychologique de la famille ?

    - Oui, je viens juste de terminer ! D'après ce que j'ai compris, le père ne tient pas à sa fille ni à sa femme. Il paraît violent, colérique. Imprévisible, aussi. Il a l'air de s'emporter rapidement. Je ne comprends pas vraiment pourquoi il s'est marié. Ni pourquoi il a fait un enfant à sa femme. Je me suis dit qu'il avait peut-être espéré avoir un garçon et qu'il a été tellement déçu d'avoir une fille qu'il n'a pas pu s'empêcher de la haïr ainsi que sa femme. Il la rend peut-être responsable de ça.

    « Quant à elle, elle m'a l'air dépressive. Je pense qu'elle commence à avoir peur de son mari mais qu'elle ne veut pas le quitter. Soit parce qu'elle continuer de l'aimer encore, au fond d'elle-même, soit parce qu'elle a peur des représailles. Peut-être qu'elle n'est pas certaine non plus d'obtenir la garde ensuite. Tu m'as dit qu'elle était mère au foyer, donc sans emploi. Elle ne pourrait pas subvenir seule à ses propres besoins et à ceux de sa fille. Elle n'est pas sûre d'en obtenir la garde d'ailleurs... C'est sûrement ce qui l'a pousse à rester. Elle a l'air d'avoir ses petites habitudes et d'y être attachée. Je pense qu'elle se laisserait vite aller si on ne retrouve pas vite sa fille.

    « Quant à la petite, elle est téméraire. Elle n'aime pas qu'on la contredise ni qu'on pointe du doigt ses défauts, même si elle en est consciente. Elle est narcissique et elle a l'air d'avoir beaucoup de fierté. Elle ne laissera pas faire par celui qui l'a enlevée et cherchera tous les moyens possibles de s'échapper même s'ils sont dangereux.

    - Autre chose ?

    - Oui ! J'ai trouvé des similitudes avec d'autres affaires non résolues. Toutes à Westminston. En 3 ans, 12 autres enfants ont été enlevés dans la forêt de Mira. Mais on a jamais pu les retrouver. Ni les enfants, ni leur ravisseur.

    - Rien ?

    - Non. Ces enquêtes avaient été confiées au commissariat d'une autre ville, à côté de Westminston.

    - Mais la forêt de Mira appartient à noter ville ? Les disparitions qui ont lieu dedans nous concernent !

    - Oui mais, va savoir pourquoi, ils ne nous les ont pas confiées !

    - Merci Simönn.

    - De ?

    - D'avoir fait tout ça aussi vite.

    - Je sais que ce genre d'affaires te tient à cœur Ïga. Si tu veux continuer d'en parler, tu sais que la porte de ce bureau te sera toujours ouverte.

    - Oui je sais. Et je ne te remercierai jamais assez pour ça.

    - C'est une bonne chose tu sais. D'en avoir parlé à Ïan. Parce que tu le vois tous les jours, ou presque. Et que dès que tu en as envie, dès que quelque chose te tracassera, je sais qu'il sera là pour t'écouter et t'aider.

    - Oui...

    - Allez, bonne chance Ïga. Je suis sûr que vous allez la retrouver.

    - Oui. »

     

     Ïga serra brièvement Simönn dans ses bras avant de sortir du bureau. Elle savait maintenant qui elle avait eu peur de réveiller en frappant trop fort à la porte : ses vieux Démons...


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  • Dimanche 24 janvier 2009, 18h32, maison de « L'homme au chapeau ».



    Quand Ahénolïa ouvrit les yeux, elle ne vit, tout d'abord, rien. L'homme au chapeau avait laissé les volets de la chambre fermés et la pièce était plongée dans le noir.

    Elle savait qu'il était passé plus tôt, probablement pour vérifier qu'elle dormait. Alors qu'elle se frottait les yeux, la porte de la chambre s'ouvrit et les volets aussi. Et il entra.

    « Alors, Nolie ? Bien dormi ? Tu n'as toujours pas mangé ?

    - Laissez-moi partir et je ne dirai à personne qui vous êtes.

    - Ahénolïa... tu es tellement... peu crédible. Je ne te crois pas une seule seconde. Ça se voit dans tes yeux. Tu n'es qu'une menteuse.

    - JE NE SUIS PAS UNE MENTEUSE ! Arrêtez avec ça !

    - Arrête de hurler Nolie, tu me casses les oreilles.

    - Laissez-moi partir...

    - Non. Tu vas payer pour ce que tu as fait Nolie.

    - Mais qu'est-ce que j'ai fait à la fin... ?

    - Tu es une peste. Une menteuse. Une petite chieuse. Une gamine. Une sale gosse hautaine. Une... je ne peux pas te supporter Ahénolïa. Tu es imbuvable...

    - Mais comment est-ce que vous me connaissez ?

    - Ah, ça, Nolie, tu ne le sauras jamais.

    - Mais pourquoi ?

    - PARCE QUE ÇA NE SERT À RIEN !!! TU SERAS MORTE AVANT D'AVOIR PU DIRE UN DERNIER AU REVOIR HYPOCRITE À TES SALETÉS DE PARENTS !!!!!

    - DITES PAS ÇA DE MES PARENTS !!!

    - JE DIS CE QUE JE VEUX PETITE IDIOTE !!! TU TE PRENDS POUR QUI ???

    - POUR QUELQU'UN DE MOINS PATHÉTIQUE QUE VOUS ! »

    *CLAC*

    Le coup assené fut violent. L'homme au chapeau mit une claque si forte à Ahénolïa que la tête de la petite partit sur le côté. Les larmes lui montèrent aux yeux et elle se mit à pleurer silencieusement.

    « T'es ridicule. Ne me traite pas de pathétique Nolie, parce que si moi je le suis, alors je ne sais même pas ce que tu pourrais bien être... »

    Sur-ce, L'homme au chapeau sourit à Ahénolïa et sortit de la chambre. De grosses larmes roulaient à présent sur les joues rebondies de l'enfant et elle les essuya d'un revers furieux de la main.

    « Non... Il me fera pas pleurer. Je suis plus un bébé. Il m'aura pas... »

    Ahénolïa tourna alors la tête vers sa table de chevet et s'aperçut que, à ses pieds, un plateau en plastique blanc, contenant à manger, s'y trouvait.

    Elle se leva alors de son lit, se baissa pour prendre le plateau et remonta dans son lit avec. Il était large et dessus était posé trois assiettes blanches. Elles étaient chacune couvertes d'une cloche en plastique, afin de garder au chaud ce qu'elles contenaient. Elles étaient de différentes tailles : la première, tout à gauche, était petite. Au milieu se trouvait une très grande, de la taille de celles que maman mettait à table quand le repas était près. La troisième, à droite, était de la même taille que la première.

    Sur ce plateau se trouvait également un morceau de pain, un verre rempli d'eau, un yaourt nature sucré, des couverts et deux serviettes en papier.

    Ahénolïa prit la cloche qui était posée sur la première assiette et découvrit le plat. Une fumée chaude s'échappa de l'assiette et Ahénolïa dut attendre quelques secondes pour réussir à voir ce que contenait le plat. C'était un friand au fromage, comme ceux que faisaient maman. Et, au grand damne d'Ahénolïa, il avait l'air délicieux.

    Elle s'empara donc de sa fourchette et de son couteau et entreprit de manger son entrée.

    Elle avait raison. Il était vraiment exquis. Elle déglutit difficilement en pensant au fait que c'était sûrement L'homme au chapeau qui l'avait fait, ou du moins qui l'avait acheté.

    Elle découvrit ensuite la plus grande assiette et se retrouva face à deux endives au jambon, recouvertes de fromage fondu. Elle les dévora en à peine cinq minutes et se força à ne pas penser à celui qui les lui avait apportées.

    Elle but la moitié de son verre d'eau et retira ensuite la cloche de la troisième assiette. Elle contenait un assez gros morceau de brownie au chocolat, avec des éclats de noix à l'intérieur.

    Délicieux.

    Après avoir fini ce dessert, elle n'avait même plus faim pour son yaourt et son pain. Elle les laissa donc sur son plateau, qu'elle reposa à terre, se disant qu'elle les prendrait pour son goûter.

    Ahénolïa se rallongea sur son lit, croisa ses bras sous sa nuque et se mit à contempler le plafond de la chambre.

    Tout ce repas la perturbait. Comment... comment se faisait-il que L'homme au chapeau lui avait servi chacun de ses plats préférés ? Comment ? Et comment connaissait-il son surnom ?

    Elle ne le savait pas... Mais ce qu'elle savait, c'est qu'il fallait absolument qu'elle trouve un moyen de sortir d'ici.

    (Comment est-ce que je vais bien pouvoir sortir de là ? Je ne pourrais jamais partir par la porte d'entrée, il doit sûrement la surveiller. Il y a sans doute une porte à l'arrière mais de toute façon je ne pourrais jamais descendre en bas sans qu'il ne me voit... Alors... Mais oui !)

    Ahénolïa se releva d'un seul coup et traversa la chambre sans faire le moindre bruit.

    Et elle s'approcha de la fenêtre.

    (Croisons les doigts pour qu'il ne l'ai pas verrouillée... S'il vous plaît... Faîtes qu'elle ne soit pas fermée...)

    Elle prit dans le haut de la fenêtre et commença à tirer sur la poignée afin de faire basculer son Velux pour l'ouvrir.

    *CLAC* *CLAC*

    Face au silence, le bruit de la fenêtre qui s'ouvrit fut presque assourdissant. Nolie se doutait que L'homme au chapeau l'avait sûrement entendu. Et elle avait raison...

    « Nolie ? Qu'est-ce que tu fous bordel ? Si jamais tu... la fenêtre ! »

    Sans réfléchir, Ahénolïa passa une jambe par-dessus le rebord, puis l'autre et se retrouva debout sur le toit. Elle entendait L'homme au chapeau courir dans l'escalier. Elle se mit à son tour à courir sur le toit. Tandis qu'elle se laissait glisser le long de la gouttière, elle l'entendit ouvrir la porte de la chambre à la volée et se ruer vers la fenêtre. Elle se tourna pour voir où il était et le vit passer la tête par l'ouverture du Velux.

    « AHÉNOLÏA ! REVIENS ICI ! SI JAMAIS JE T'ATTRAPE JE TE JURE QUE TU NE REVERRAS PLUS JAMAIS LA LUMIÈRE DU JOUR ! REVIENS ICI TOUT DE SUITE ! »

    Nolie atterrit dans le jardin et se mit à courir pour contourner la maison. Elle arriva alors dans l'allée centrale, entre la porte d'entrée et le portillon, fermé à clé. Elle courut le plus vite possible et sauta par-dessus le petit portail blanc. Elle arriva dans la rue et courut vers la gauche.

    (C'était par là qu'on est arrivés hier, se souvint-elle.)

    Et elle courut le plus vite possible, aussi vite que ses petites jambes le permettaient. Elle avait déjà une bonne longueur d'avance sur L'homme au chapeau. Il n'avait pas réussi à sauter par-dessus la barrière comme Nolie. Il avait dût l'enjamber, plus lentement, alors qu'il avait déjà du retard sur l'enfant. Ils étaient maintenant tous deux lancés dans une course poursuite.

    L'homme au chapeau risquait la prison. Et Ahénolïa Sting risquait la mort. Elle courut jusqu'à arriver au bout de la rue puis tourna à droite. A partir de là, elle ne se rappelait plus très bien du chemin qu'ils avaient emprunté...

    Elle continua de courir le plus vite possible, mais chaque fois qu'elle jetait un coup d'oeil en arrière, elle avait l'impression que L'homme au chapeau se rapprochait de plus en plus. Elle tourna ensuite à gauche, puis encore à gauche... et se retrouva dans un cul-de-sac.

    Alors, elle se retourna et le vit. Il était là, à cinq mètres d'elle, et lui barrait le passage avec ses bras. C'était fini. Elle avait perdu. Et il lui souriait.

    « Alors Nolie ? On a perdu ? C'est dommage tu ne trouves pas ? Je pensais que tu aurais fait durer le jeu un peu plus longtemps...

    - Je... je...

    - Shhh... Ne dis rien. Tu auras tout le temps de bavarder à la maison. Avec tes petits camarades. »

     

     L'homme au chapeau s'approcha à pas lents de la petite fille. Elle était coincée, dos au mur, et ferma les yeux. Il lui prit alors la tête et la frappa violemment contre ce mur. Nolie tomba à terre, assommée. 


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  • Lundi 25 janvier 2009, 19h43, commissariat de police de Westminston, bureau du lieutenant Bory.



    Ïga était assise à son bureau. En face d'elle se tenaient Hirvy, Spitz et Berhzo. La journée avait été longue et ils avaient tous les quatre aidé les patrouilles et les bénévoles à ratisser la forêt. Comme ils s'en doutaient, ils n'avaient pas trouvé trace de l'enfant. En revanche, ils étaient sortis des sentiers battus de la forêt et s'étaient aventurés entre les troncs. Ils avaient alors trouvé un rouleau de Chatterton. Un indice de plus qui les conduirait probablement à la petite.

    Ils avaient également trouvé des traces de pas. Des petites et des grandes. Ils avaient donc pris de multiples photos et les avaient envoyées au laboratoire du commissariat.

    Et maintenant ils attendaient. Les résultats n'arriveraient que le lendemain, au plus tôt, mais Bory avait voulu faire un point avec son équipe, après leur journée.

    « Bon, on va partir sur la piste de l'enlèvement ! Toutes les photos qui ont été prises ont été envoyées au labo dans l'après-midi. Demain on aura peut-être les résultats pour les traces de pneus du parking et pour les empreintes dans la forêt.

    - Ça pourrait être les empreintes de n'importe qui... un petit garçon qui se promène avec son grand-père... une petite fille qui va cueillir des fleurs avec sa mère... souligna Spitz.

    - Eh bien on le saura demain.

    - OK. Mais les traces de pas ne nous donneront pas le nom de la personne qui portait les chaussures.

    - Non mais elles nous donneront le poids de la personne, on pourra savoir si c'est plutôt un homme ou une femme, sa taille approximative. Et puis c'est les traces de pneus qui nous donneront sûrement la marque de la voiture. Et alors on pourra remonter à l'acheteur, donc à notre homme.

    - D'accord.

    - Alors demain on voit tout ça et je repasserai voir Jarvy.

    - Je viendrai avec toi ! lui dit Hirvy.

    - OK. Alors c'est bon. Ensuite on verra ce qu'on fera quand on en saura plus.

    - D'accord.

    - C'est bon pour tout le monde ?

    - Pas de problème ! lui répondirent les trois hommes.

    - Alors vous pouvez rentrer chez vous.

    - OK. Tu veux que je te raccompagne Ïga ? lui demanda Hirvy.

    - J'ai ma voiture sur le parking Ïan, tu sais et...

    - C'est pas grave ! Je t'amènerai ici demain ! Allez, dis oui !

    - Bon... euh... d'accord. »

    Spitz et Berhzo se lancèrent des clins d'oeil complices et souriaient. Ïan aussi souriait mais de joie et de satisfaction. Quant à Ïga, elle se demandait pourquoi Hirvy était si enthousiaste et insistant.

    Les quatre agents sortirent du bureau, Ïga referma la porte à clé et ils descendirent tous jusqu'au parking. Irvy et Kurt montèrent dans leurs voitures respectives tandis que Ïan et Ïga s'en allaient à pieds.

    « Désolé, ma voiture est au garage alors on est obligés de rentrer à pieds. Mais je pourrai bientôt la récupérer normalement.

    - Ta Citroën ?

    - Oui !

    Ils continuèrent de marcher en silence pendant plusieurs minutes, mais Ïga ne savait toujours pas ce que son collègue avait en tête.

    - Alors, que me vaut ce plaisir ?

    - Rien... c'est juste comme ça. lui répondit-il en souriant.

    - Tu veux tout savoir Hirvy ?

    - Hum ?

    - Je ne te crois pas une seule seconde ! lui avoua-t-elle en éclatant de rire.

    - Qu'est-ce qui te fait croire que je mens ?

    - Ton sourire bête, peut-être...

    - Mais, non, p... pas du tout... se mit-il à bafouiller.

    - Allez Ïan, dis-moi ce qui te tracasse.

    - Rien... je... je voulais juste t'inviter à dîner. Chez moi. Si tu veux bien.

    - Oui, bien sûr.

    - OK. Alors direction chez moi.

    - Pas de problème !

    - OK. »

     

     Ïan et Ïga continuèrent à discuter de tout et de rien jusqu'à ce qu'ils arrivent enfin à destination. 


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